je suis nombreux

je suis le nombre. je suis nombreux. je suis une population dense et nombreuse. je n’ai pas de forme. je suis encore une ombre. je suis plusieurs à être dans mon ombre, sans forme. je suis une pluralité d’ombres, une pluralité de formes dans l’ombre de moi-même. je suis moi-même dans un nombre à la forme malléable. je suis légion. je suis une multitude. je me tais. je suis une multitude faite de silence. je suis un silence densément peuplé. je suis nombreux. je suis dénombrable. je me compte. je suis un, puis deux, puis trois, puis quatre, puis cinq, puis six, puis sept, puis huit, puis neuf. je ne m’arrête pas. mon nombre ne s’arrête pas. je ne m’arrête pas dans mon ombre dans l’ombre de ceux qui me peuplent. je me peuple. je peux vivre dans ma densité. ma langue est une densité. elle se compte par le nombre de langues au centimètre carré. ma langue se compte. ma langue est une dans sa multitude. elle est une et unie. elle ne supporte pas sa propre division. elle ne supporte pas d’être contrariée. ma langue ne dit rien. ma langue parle. elle ne dit rien. elle est nombreuse et identique. elle est silencieuse. elle se déforme. ma langue est creuse. il y a une foule qui parle en moi. une foule multiple et une. je ne suis pas une contradiction. je suis une imbrication de contradictions. je suis un entassement de mots et de données contradictoires. je suis une foule. je suis envahi par des voix. je suis le nombre. je suis les années multipliées par le nombre. je me compte. je n’ai ni fin ni commencement. je suis légion. mon corps ne bouge pas. je suis légion. je suis le nombre qui parle. je suis le nombre qui ne dit rien. je n’ai pas de nom, mais un millier de noms. je suis plusieurs à être nommé. je suis plusieurs. je suis confus dans mon unité. je suis confus dans mon unicité. mon nom est une question en suspens. mon nom est une question. je n’y réponds pas. je n’y réponds pas. je n’y réponds pas.